Le sommet de Washington sur la sécurité nucléaire a produit à la fois moins et plus que ce qu'on en attendait.
Bien que le Président Obama prétende à un leadership visionnaire sur le sujet, comme l'a noté mon collègue Christopher Ford, il reprend très clairement l'un des piliers de la politique américaine de défense des Présidents Clinton et George W. Bush : sécuriser les matériaux nucléaires avant qu'ils tombent entre les mains de terroristes. En 2006, les Présidents d'alors, George W. Bush et Vladimir Poutine, ont signé le Global Initiative to Combat Nuclear Terrorism un accord international visant à neutraliser les dangers liés à la prolifération des armes nucléaires. Aujourd'hui, soixante-dix-sept nations y prennent part, diffusent des informations stratégiques, mènent des procédures de régulation et appliquent les règles en la matière.
Si l'actuelle conférence qui a réuni quarante-sept leaders mondiaux a superbement ignoré les sensibles progrès effectués par le passé dans ce domaine, elle a apporté une attention nouvelle sur cette épineuse question. Grosso modo, les choses qu'il fallait dire ont été dites. Reste toutefois à voire si, pour une fois, les Gouvernements à court d'argent du fait de la crise pourront investir des sommes significatives .
Toutefois, comme me l'a raconté un diplomate européen cette semaine, l'essentiel à retenir de ce sommet ne réside pas dans ces grands rassemblements multilatéraux, mais dans le fait que beaucoup de leaders mondiaux ont été frappés par le style pédantesque du Président Obama, que les Congressistes républicains supportent depuis longtemps.
Quoique la question iranienne ait été le sujet que chacun avait en tête lors du sommet, elle ne figurait officiellement pas sur l'agenda. Ce sujet brûlant a souvent été abordé lors des rencontres bilatérales des leaders mondiaux à Washington, qui, m'a rapporté ce même diplomate, ont été les véritables lieux de travail et de décision.
Obama a mené une douzaine d'entretiens bilatéraux, dont les plus importants ont été réalisés avec la Chine. Bien que de prime abord le Président paraisse avoir gagné du terrain avec les Chinois s'agissant de sanctions à l'égard de l'Iran, ce que la Chine a accepté semble au final flou.
La rencontre bilatérale qui a eu le plus d'impact est celle du Président Sarkozy avec Lula, son homologue brésilien. De concert avec la Turquie, Lula - un ancien allié des Etats-Unis d'Amérique - a travaillé à changer la donne diplomatique entre l'Iran et l'Occident, minant de fait les efforts déployés par Sarkozy dans ce domaine depuis 2007.
Lula entend, par exemple, se rendre mi-mai en visite officielle à Téhéran en compagnie de Ministres-clés afin de renforcer les relations économiques des deux pays.
Lula a pris ses distances vis-à-vis du populisme radical de son voisin, Hugo Chavez, dont la proximité avec la République Islamique d'Iran a poussé d'aucuns à Washington à surnommer plaisamment son pays « Venezuelistan ». Mais sa diplomatie indépendante, sa réticence à adopter des sanctions économiques contre l'Iran, son désintérêt pour la situation des droits de l'homme en Iran et son empressement à témoigner des intentions nucléaires pacifiques du pays ont été immensément déroutants.
Suite à sa rencontre bilatérale avec Sarkozy, Lula a finalement déclaré que l'Iran s'exposerait à des sanctions significatives dans l'hypothèse où le pays déciderait de poursuivre son programme d'armement nucléaire. Une déclaration claire et ferme en effet, qui constitue un premier pas dans la bonne direction. La pression exercée sur Lula ira crescendo à l'approche de son voyage en mai espérons que Sarkozy et ses alliés parviendront à lui faire quitter la route de l'apaisement.